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dimanche 6 décembre 2009

DISCOURS AU CONGRES EXTRAORDINAIRE DE L'UNION SOUDANAISE-R.D.A.

Chers Camarades,
A la Conférence territoriale du Parti, il y a trois semai¬nes, no us nous sommes contentes d'un expose objectif du déroulement des événements de Dakar, sans en tirer les conséquences. Nous avons par la suite pris un certain nom¬bre de contacts qui ont projeté plus de lumière sur les ori¬gines plus ou moins lointaines desdits événements. C'est ain¬si que j'ai répondu à l'appel du Président de la République Française aux invitations du Roi du Maroc et du Président de la République du Ghana. D'autre part, des missions ont été envoyées à l'extérieur: U.S.A., O.N.U., Allemagne Fédérale, pays de l'Est, Afrique occidentale.
Pour mieux suivre Ie sens de notre action politique pen¬dant ces derniers mois, il est indispensable que nous exami¬nions la situation créée en Afrique de puis Ie Referendum du 28 septembre 1958.
Le 28 septembre, les conditions politiques intérieures nous imposèrent un vote favorable à l'entrée dans la Communauté.
En outre, nous avons pense et pensons encore que les chances de réalisation de l'unité sont très aléatoires pour des Etats accédant à l'indépendance car, devenus souverains, ils affirment leur personnalité aussi bien sur Ie plan intérieur que sur Ie plan extérieur.
Aussi avions-nous espère que l'autonomie était pour les Etats africains la période la plus favorable de leur évolution pour la réalisation de leur unité. Evidemment, cela supposait de la part des dirigeants de ces Etats, une indépendance totale à l'égard des puissances d'argent et des autorités des anciennes métropoles.
Par ailleurs, nous avons estime et estimons encore que c'est dans 1'unité que 1'Afrique pourra résister à l'emprise des forces impérialistes et renforcer Ie camp de la paix.
A l'exclusion de la République Arabe Unie dont on ne peut pas encore tirer toutes les conclusions sur Ie plan afri¬cain, mais qu'il faut néanmoins saluer comme une volonté de l'Afrique de réaliser son unité, et de la Fédération du Mali dont I'existence fut précaire par la trahison des diri¬geants sénégalais, les Etats indépendants d'Afrique en sont encore a la recherche des bases de coopération sur Ie plan économique et culturel Mais nous pensons qu'il faut aller au-delà de ces formules pour que l’Afrique puisse résister a 1'adion destructrice des anciennes puissances coloniales qui, ayant perdu la domination politique, veulent asseoir une domination économique et culturelle. Certes, il faudra du temps et des efforts. Dans ce domaine, aucun pays ne peut nous donner des leçons de patience et de courage.
D’aucuns peuvent penser que notre association avec Ie Senegal a été un échec. C'est voir subjectivement le problème, ce qui empêche d'en saisir toutes les conséquences.
Tout d'abord, la Fédération du Mali a permis au Sene¬gal d'aIler a l'indépendance parce que tout Ie mande sait que les dirigeants ; sénégalais , empêtrés dans leurs difficultés intérieures, isolés du reste de l' Afrique, et pour cause, ne pou¬vaient pas, seuls, y conduire leur pays.
D' autre part, l'accession à la souveraineté internationale de la Fédération du Mali a conduit certains Etats africains, jusqu'alors hostiles à toute idée d'indépendance, à faire usa¬ge de leur droit a l'indépendance. Faudrait-il rappeler que la création du Mali et son accession a l'indépendance ont considérablement contribue a la réalisation de l'unité poli¬tique au Soudan. Nous avons pu ainsi nous assurer du contrôle politique et administratif de la République Soudanaise. J’estime également que la sécession du Senegal a été Ie ferment de la mobilisation générale des populations soudanai¬ses. ElIe permettra à la République Soudanaise de réaliser pleinement ses objectifs politiques, économiques, sociaux et culturels sur la base d'un véritable socialisme, et unique¬ment en Fonction des intérêts des couches les plus défavori¬sées. La démonstration sera également faite aux dirigeants sénégalais que la République Soudanaise était Ie principal marche des industries et entreprises sénégalaises, que notre République n' Hait pas pauvre et que Ie Senegal Hait riche de notre richesse. Nous entendons garder nos richesses, mêmes humaines, pour accélérer Ie développement économique de notre République*. (* Allusion aux agriculteurs maliens qui, sous Ie régime colonial, se rendaient chaque année au Senegal pour aider ce pays a produire des arachides, On les appelait les " navétanes note de bas de page)
Les mesures prises, tant a l'intérieur de la République Soudanaise qu' a l' extérieur, nous imposeront pour une cer¬taine période des sacrifices qui sont, je le sais, déjà accep¬tes. II faut prévoir un isolement possible du Soudan, par la force des choses et par l'évolution des événements politi¬ques. II s'agit donc des maintenant, face a cette éventualité, d'envisager les voies et moyens pour une économie socialiste planifiée. Nous ne nous arrêterons pas aux slogans, aux formu¬les toutes faites, nous innoverons, partant des réalités malien¬nes greffées sur les expériences réussies ailleurs. Est-il besoin de préciser que la modification de nos structures économiques n'entravera en rien les activités normales du secteur privé ?
Vis-à-vis de la République Française, nous avons fait preuve de loyauté. Je ne veux pas ici reprendre les argu¬ments développés dans certains journaux qui précisent les origines, les causes réelles de la sécession du Senegal. Notre position sur le problème algérien, notre détermination construire un véritable socialisme, notre volonté de réaliser, avant toute autre association, une véritable communauté africaine, ont déterminé certains responsables français" à conduire les dirigeants sénégalais à la sécession. Je n'en veux pour preuves que quelques faits :
1° Le refus systématique de la France, en application des accords franco-maliens, d'apporter son appui pour que soit assurée la sécurité intérieure de la Fédération du Mali ;
2° L'attentisme du Gouvernement Français dans l'appli¬cation des accords franco-maliens, en particulier dans le do¬maine économique;
3° L'intervention de la République Française auprès des organismes directeurs du Marche Commun pour que ceux¬-ci attendent la conclusion des événements avant d'honorer leurs engagements vis-à-vis de la Fédération du Mali ;
4° Les termes mêmes du message de félicitation du Général de Gaulle a M. Senghor, nomme Président de la République du Senegal ;
5° L' aveu du Premier Ministre de la République Française de son action, en décembre dernier, auprès de M. Sen¬ghor et Dia - pour qu'ils transforment la Fédération du Mali en confédération ;
6° La reconnaissance par Ie Gouvernement Français de l'indépendance du Senegal. Cela se conçoit aisément puisque ce sont les dirigeants français qui ont inspiré, préparé, dé¬clenché, soutenu la sécession de la République du Senegal;
7° Enfin la demande d’ajournement par la• France a l'O.N.U. de 1'admission de la Fédération du Mali.
Nous ne voulons pas abuser de votre patience en faisant un long développement que j'estime en la circonstance inu¬tile. II s'agissait donc pour nous de prendre des décisions en fonction des seuls intérêts de la République Soudanaise.
Dans un monde de plus en plus tourmente où la légalité n'apparaît qu'a travers les intérêts stricts des pays, la lutte pour nous devra s'engager sur Ie plan politique.
Nous demeurons certes fidèles a l'idée de la Fédération africaine, no•Q us nous considérons toujours lies par Ie serment du 17 janvier 1959. Mais pour le succès de notre action en faveur de la Fédération, il est indispensable et urgent que la République Soudanaise s'affirme sur Ie plan africain et sur Ie plan international. C'est la raison pour laquelle nous vous invitons à autoriser l'Assemblée législative:
1° A appréhender les compétences transférées par la République Soudanaise A la Fédération du Mali ;
2° A proclamer comme Etat indépendant et souverain la République Soudanaise;
3° A proclamer que la République Soudanaise s' appelle République du Mali, libre de tous engagements et liens poli¬tiques vis-à-vis de la France, comme la Haute-Volta, la Cote d'Ivoire, Ie Niger, Ie Dahomey. C'est la conséquence logique de la caducité des accords franco-maliens que la France a délibérément violes en reconnaissant la République du Se¬negal comme Etat indépendant.
Notification de ces décisions sera faite au Gouvernement Français, à l'Organisation des Nations Unies et à tous les pays indépendants.
Fidèles à notre idéal d'union et de paix, j'insiste sur ce mot, nous sommes décidés A établir des relations amicales avec tous les Etats du monde, sans exclusive aucune, singulièrement avec ceux d’Afrique qui seront désireux de promouvoir une politique d'union et de progrès, de s'engager résolument dans la lutte pour la libération totale du Continent africain et l'établissement d'une paix durable entre tous les peuples.
La République du Mali est née. Le Mali continue. Le mot Mali continuera à résonner comme un gong sur la conscien¬ce de tous ceux qui ont oeuvre a 1'eclatement de la Fédération du Mali au qui s’en 'sont réjouis. Nous restons mobili¬ses pour l'idée de la Fédération qui, malgré tout, demeure une semence virile de l'unité africaine. Nous avons perdu une partie, mais nous gagnerons la manche, in Challah. Les puissances d'argent, les forces rétrogrades et impérialistes n'y pourront rien.
Camarades, la Fédération du Mali en tant qu'entité ter¬ritoriale n'existe plus. Son support politique était Ie Parti de la Fédération Africaine dont Ie Président est M. Senghor. La rupture entre la République Soudanaise et la République du Senegal provoquée par des contradictions politiques fondamentales, met en cause l’existence et Ie fonctionne¬ment du P.F.A. D'autre part, celui-ci était 1'expression poli¬tique d'une idée a laquelle nous demeurons attaches mais qui fut trahie dans des circonstances peu honorables par son Président et 1'Union Progrèssiste Sénégalaise. Le P.F.A. ne peut donc pas survivre a 1'ec1atement de la Fédération du Mali. L'Union Soudanaise~R.D.A. doit se libérer de toute attache avec cette formation politique, garder son autonomie jusqu' a ce que puissent s’affirmer des positions claires et nettes sur les problèmes politiques et économiques que les Etats africains ont a affronter au lendemain de leur indépendance. Plus de construction politique dans l'équivoque. Clarté dans nos positions, c1arte dans celles de nos parte¬naires éventuels, voila les conditions indispensables d'une dépendance quelconque de 1'Union Soudanaise R.D.A. vis-à-¬vis de formations politiques africaines. L'Union Soudanaise ¬R.D.A, fidèle a son option fondamentale en faveur de la paix et 1'unité africaine, est décidée des maintenant a établir des relations de bonne volonté, d'amitié et de solidarité avec tous les partis politiques mobilises pour la paix, pour la libé¬ration du Continent africain de toute domination étrangère et pour l'unité des peuples africains.
Camarades, vous pouvez faire confiance au Bureau Sénégalaise, au Comite directeur. Nous voulons ce que vous voulez. II n'y a pas de temps à perdre. Toutes les Maliennes et tous les Maliens doivent se considérer comme mobilises pour la construction de la République du Mali, patrie de tous ceux qui sont fermêment attaches a la réalisation de l'Indépendance et de 1'Unité africaine, toutes les Maliennes et tous les Maliens doivent accepter tous les sacrifices pour que notre pays puisse sortir grandi, rayonnant, de 1'épreuve qu'il tra¬verse pour que les Africains libres, réellement libres, puis¬sent, sans possibilité d'ingérence, s'unir pour que s'affirme une grande nation africaine qui marquera de son sceau la politique internationale, pour que la paix, espoir des peuples en voie de développement, s'établisse entre tous les pays du Monde.

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